Une victoire
Parmi les nombreuses batailles qui opposent le monde cynégétique à ses différents détracteurs, il en est une que nous menions de longue date et que nous venons de gagner : l’autorisation des modérateurs de son pour toutes les armes, tous les modes de chasse, pour tous les gibiers et toutes les espèces dites « nuisibles ».
En vertu d’un arrêté publié au Journal Officiel par le Ministère de la Transition Ecologique, les mots « l’emploi sur les armes à feu de tout dispositif silencieux destiné à atténuer le bruit au départ du coup » ont disparu de l’article 2 de l’arrêté du 1er aout 1986 autorisant de facto leur usage à la chasse.
Nous étions en retard sur ce point, contrairement à un certain nombre de nos voisins européens, Royaume Uni en tête où l’on considère le modérateur de son comme indissociable de la santé publique. Les chasseurs viennent donc de gagner un nouveau droit, chose importante à noter dans un contexte où il nous arrive plus souvent d’en perdre.
C’est une grande victoire car la répétition des chocs auditifs détériore irrémédiablement l’audition. Et l’usage du modérateur de son augmente à plusieurs niveaux le confort du chasseur permettant des tirs de meilleure qualité.
Sachez cependant que cet acquis est d’ors et déjà remis en cause. L’ASPAS (Association pour la Protection des Animaux Sauvages) a mis en ligne une pétition riche à l’heure actuelle de plus de 71 000 signatures, exhortant le Ministre de la Transition écologique à dire « NON aux silencieux sur les armes de chasse ! » avançant que « désormais, les braconniers se frottent les mains et les promeneurs serrent les fesses ! » (sic).
Depuis le 2 janvier, date de parution de l’arrêté, il faut reconnaître que les débats font rage jusque dans nos rangs sur les réseaux sociaux et ailleurs… certains chasseurs voyant d’un mauvais œil l’arrivée de ce nouvel ustensile.
Il convenait donc de faire un point afin de remettre les choses dans leurs contextes et de donner à chacun les éléments nécessaires à la compréhension de ce nouvel objet.
Modérateur de son : une guerre de mots
Tout d’abord, l’objectif de cet appareil n’est pas de rendre l’arme de chasse silencieuse, mais bien d’en réduire le son, avec pour but d’améliorer le confort d’usage du chasseur et donc la qualité de son tir.
Comme dans beaucoup d’autres débats, les mots ont ici aussi une importance singulière.
C’est la raison pour laquelle ceux qui trouvent ce dispositif néfaste le nomment abusivement « silencieux » et ses adeptes en revanche l’appellent « modérateur » ou « réducteur de son » conformément à la réalité de la fonction de l’objet.
Quoi que certains en disent, vous ne verrez pas de « silencieux » sur vos armes de chasse et le jour où nos carabines feront le bruit des « flingues du KGB » dans un vieux James Bond n’est pas venu (et n’est d’ailleurs pas souhaitable).
Un peu de physique…
Le bruit perçu lors d’un coup de feu se décompose en deux mouvements.
Dans un premier temps, lors du départ du coup, la balle quitte le canon suivie par les gaz résultant de l’explosion. C’est sur cette partie du bruit que le modérateur agit, en offrant une chambre de décompression à ces gaz réduisant amplement la pression avant que ceux-ci ne se répandent dans l’atmosphère.
Les réducteurs permettent ainsi, en fonction de leur qualité, de réduire d’entre 10 et 30 décibels le bruit de l’explosion.
En raison du fonctionnement logarithmique de l’échelle des décibels, il faut comprendre qu’une réduction de 20 décibels correspond à la réduction de 90% du bruit.
Ce qui permet de faire passer d’environ 170 à 140 décibels le bruit de l’explosion, le réduisant au seuil considéré comme ne présentant aucun risque pour l’ouïe si l’exposition est temporaire. Cependant 140 décibels c’est à peu près le bruit généré par un avion de chasse, ce qui balaye d’emblée les arguments avançant que désormais on peut chasser en silence, compliquant ainsi le travail des gardes et en mettant en danger les promeneurs…
D’autant que les modérateurs influent essentiellement sur le bruit qui se dégage sur les côtés et derrière la bouche du fusil. Face à l’explosion la réduction est beaucoup plus légère.
Il faut ajouter à cela que le passage du mur du son par la balle rajoute un bang supersonique qui est, lui aussi, d’environ 140 décibels et sur lequel le modérateur de son n’a aucune influence.
Seule l’utilisation de balles subsoniques empêcherait ce bang supersonique. Mais il faut admettre que même si leur usage est possible, on n’en use que rarement à la chasse.
En effet la précision du tir n’est que rarement au rendez-vous (le pas de rayures de nos armes de chasse étant généralement incompatible avec les projectiles subsoniques). Ensuite il faut admettre que le tir est bien souvent peu tendu. Et qu’enfin, le projectile arrivant avec une vitesse trop faible s’expanse mal, rendant beaucoup plus grand le risque de blesser l’animal visé.
D’autres atouts
Le modérateur de son a cependant d’autres avantages. Outre la réduction de son, bien sûr, il réduit aussi le recul de l’arme, ainsi que la flamme de l’explosion. Augmentant là encore le confort du tireur.
Et c’est bien là son but : réduire les gênes occasionnées par l’explosion afin de permettre au chasseur de mieux tirer et réduire ainsi le risque de mauvaises balles qui pourraient blesser inutilement le gibier.
Les désavantages ?
Les désavantages des modérateurs de son résident principalement dans le poids et l’encombrement qu’ils ajoutent à l’arme.
De plus, un problème survient aussi lorsqu’on tire à plusieurs reprises : le modérateur de son ayant tendance à chauffer (à l’instar du canon lui-même d’ailleurs). Ce qui peut aboutir, en modifiant la propagation de l’air, à une gêne lors de la prise de visée.
Ensuite bien sûr viendra le prix du filetage qu’il faudra ajouter à celui du modérateur lui-même.
Enfin, bien que l’installation d’un modérateur de son ne nuise pas à la précision du tir (certains fabricants affirment même qu’il peut légèrement l’améliorer, et c’est parfois vrai), il convient cependant, comme lors d’un changement de cartouches d’effectuer un réglage au stand de tir après installation de votre appareil.
Et bien sur la visée ne sera pas la même avec et sans le modérateur…
Enfin
Alors si vous vous décidez à franchir le pas, il vous reste plusieurs solutions :
- Soit vous possédez une arme déjà filetée et il ne vous reste plus qu’à choisir parmi les nombreux modèles qui existent déjà sur le marché (attention au pas de filetage).
- Soit vous avez trouvé l’occasion de vous acheter une nouvelle arme (ne nous le cachons pas, on est toujours à la recherche d’une occasion pour s’acheter un nouveau jouet). Nombre de carabines existent d’ors et déjà avec un filetage leur permettant de recevoir le précieux appareil, et, à n’en pas douter, avec ce nouvel arrêté, c’est toute une nouvelle gamme de produit que nous retrouverons bientôt dans nos armureries préférées. Notez qu’il existe aussi des armes très bien pensées dont le canon lui-même est silencieux. Là pas de possibilité d’enlever ou de mettre le modérateur de son, c’est l’arme dans son entièreté qui est conçue pour réduire le bruit du tir. En revanche l’équilibre n’est plus modifié.
- Soit enfin, faire modifier vos armes actuelles afin qu’elles puissent recevoir un modérateur. (Un conseil, même si cela paraît évident ! Faites faire ce travail par un vrai armurier !!!) Il faudra compter entre 100 et 200 euros pour trouver un bon filetage, puis y ajouter l’achat d’un modérateur dont le prix varie selon la marque et la qualité. Ca commence à 300 euros et ça monte à pas loin de 1 000. Notez que les modérateurs de son sont disponibles pour de très nombreux calibres.
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Les arguments pour :
– Permettre une chasse au plus proche de la nature tout en préservant ses oreilles (et celles de ses camarades de chasse).
-Réduire le recul, réduire la flamme et donc augmenter le confort du tireur et par voie de conséquence la précision de ses tirs.
– Réduire la pollution sonore environnementale, notamment en milieu périurbain.
Les arguments contre :
– Il nuit à l’esthétique de l’arme (les goûts et les couleurs)
– Il faut re-régler son arme (oui, mais comme lorsque l’on change de cartouches)
– Il y a une différence de visée avec et sans le modérateur (c’est vrai)
– Il augmente le poids de l’arme, son encombrement et ça modifie l’équilibre de l’arme (c’est vrai)
Les arguments fallacieux
– C’est un ustensile de braconnier (Comme s’ils attendaient une autorisation pour utiliser des choses prohibées… D’autant que les modérateurs de son étant autorisé à la vente pour le tir récréatif… il était déjà très facile de s’en procurer)
– Cela complique la tâche des gardes-chasse (Les modérateurs de son réduisent le volume du tir mais ne l’annihilent pas. Cet argument n’est donc pas recevable)
– Il nuit à la sécurité des promeneurs (Pareil, le bruit ne disparaît pas, chasser ne devient pas silencieux. Le bruit après réduction continue d’être supérieur à celui émis par un marteau piqueur, par exemple)
Liens
»»» Europ-arm : des modérateurs allant du 22lr au 338 Win
»»» Rivolier : modérateurs principalement Sauer et Blaser
10 réflexions sur « Modérateur de son : tout savoir de A jusqu’à Z »
je chasse depuis plus de 40 ans et je n ai jamais lu, entendu, une telle demande ….Jamais un collègue m a dit « dommage on n a pas le droit ua modérateur de son …..Très honnêtement qui tire plusieurs dizaine de cartouches dans la saison ?? Combien en tirez vous par traque ???? il y avait des choses plus importantes à réclamer !!!! Par contre cela à faire parler de nous en mal pendant de nombreuses minutes dans les médias par contre le renard va être protégé grande victoire pour la chasse aux petits gibiers !!!
Les chasseurs ne se sont pas du tout mobilisés, le renard sera donc dorénavant un gibier comme les autres, tant pis pour nous!
l’emploi d’un modérateur de son dans les pays nordiques et anglo-saxons est d’utilité publique, il préserve la bonne santé du chasseur, en protégean son système l’auditif, favorise le confot de tir et joue directement sur l’efficacité du Nemrod.
On ne peut nier cette évidence, un chasseur ainsi équipé améliore ses résultats de presque 5%. Quand on connait les difficultés à réaliser les plans de chasse sur le terrain, on ne peut laisser de côté cet ustensile qui en plus de protéger les oreilles du chasseur améliore son efficience.
Si les chasseurs français n’en parlent pas c’est qu’ils ont encore beaucoup de questions en attente, nos voisins beaucoup plus pragmatiques n’en posent pas et sont toujours cités en référence, alors pour une fois prenons le train quand il passe….
@ modérateur
Je comprends pas de problème. 😉
Bonjour,
Un petit mot pour compléter cette bonne présentation:
Armes de Chasse de janvier fait le tour du problème dans la mesure du possible. Présentations des produits dispos et papier de Herlé Kaigre (RDS) sur les modérateurs de son.
Pour revenir aux subsoniques la législation française impose 1000j à 100m pour le grand gibier. Pour obtenir cela il faut lancer un projectile de 21 à 315m/s à 100m….Ca limite sérieusement les possibilités….
De plus il y a d’importantes contraintes de stabilisation en raison de pas de rayures inadaptés sans compter une expansion très aléatoire…en fait nulle à cette distance. De plus la chute du projectile est conséquente. Bon choix bonne fin de saison
Pourquoi ce commentaire est il en attente de modération???
Tout les commentaires doivent être modéré avant leurs publications 😉
très bonne précisions, merci !
merci pour les précisions !
D’ailleurs, c’est le même système qu’un pot d’échappement de mobylette. Avec le pot le moteur fait un bruit raisonable, sans le pot c’est insupportable.
tout à fait